Le mois de décembre est la saison des jouets. Jusqu'au jour de l'an, il s'en fait un commerce très important.
Les jouets sont variés à l'infini. Il y en a pour tous les goûts et pour tous les âges ; mais quel que soit leur nombre, ils peuvent être divisés en deux classes : l'une comprend les joujoux qui excitent l'adresse et une activité physique, comme les balles, les toupies, les raquettes, les cerceaux, etc ; dans la seconde classe, nous rangeons ceux qui tendent à développer l'intelligence et la sensibilité : poupées, animaux domestiques, jeux de patience et tous les jeux scientifiques.
Les jouets d'un prix élevé se vendent plus couramment pendant l'année. Au jour de l'an, ce sont les articles bon marché qui s'écoulent en plus grande quantité.
Ce sujet étant d'actualité, il nous a paru intéressant de résumer quelques détails sur différents jouets.
Parmi les jouets les plus répandus figurent le lapin frappeur, les boîtes de jeux, les animaux en carton, les montres dont les aiguilles marchent, etc...
Le lapin qui frappe sur un tambour ou sur un timbre, dès qu'on le fait rouler, est d'un débit assuré. Il s'en fabrique annuellement plus de cinq cent mille. Les plus communs se vendent en gros quatre francs la douzaine et, au détail, on les cote soixante centimes pièce.
La fabrication de ces lapins est peu coûteuse : On y emploie des déchets de toute sorte : les rondelles en bois provenant de la fabrication des huiliers servent à faire les roues, les essieux sont faits avec les vieux manches de parapluie ; les timbres des pendules mises au rebut, les vieilles peaux servent également.
Tout le monde connaît ces animaux montés sur un soufflet : il y en a pour tous les goûts : cheval, chien, chat, mouton, souris. Lorsque l'on presse sur le soufflet, on entend un cri uniforme : couic, couic.
Ces petits objets, qui se vendent deux et trois sous, se fabriquent par centaines de mille.
Et le cheval sans socle, en pâte !
Il est fabriqué avec de vieux papiers que l'on pétrit après les avoir imbibés d'eau. La pâte ainsi obtenue est placée dans un moule divisé en deux parties. Lorsque la pâte est sèche, on souche les deux morceaux, et l'animal est formé ; on le trempe ainsi dans une composition faite avec de la colle et de la peinture qui forme en séchant une sorte de croûte solide. Il ne reste plus qu'à tatouer l'animal, à lui ajouter un carré de peau pour la selle et un bout de cordon jaune ou rouge pour la bride.
Ces chevaux se vendent aux marchands à raison de quarante centimes la douzaine.
La grenouille verte , qui saute au moyen d'une petite pièce de bois, formant ressort, vient en grande partie du Tyrol. Ce sont, la plupart du temps, des bergers qui s'amusent, en gardant leurs troupeaux, à tailler ces grenouilles.
Les canons en bois, les pelles, les râteaux sont fabriqués en grand nombre à Villers-Cotterets. Les dominos, les dés, les jetons se font à Méru, dans l'Oise. Les quilles, toupies, lotos, bilboquets se fabriquent à la Capelle, à Saint-Claude, à Nantes ; le Jura a la spécialité des flageolets. Les maréchaux ferrants qui frappent l'enclume à tour de rôle, le cavalier sans jambes, les petits moulins rouges, tout cela se fabrique à Liesse, dans l'Aisne.
Un petit objet, insignifiant en apparence, et qui est très important au point de vue commercial, c'est la petite montre d'enfant .
Il y a à Paris une dizaine de fabriques de montres d'enfant qui produisent, en moyenne, cent mille montres par jour ; la plus grande partie s'expédie à l'étranger. La montre vendue un sou dans la rue revient en gros à deux centimes. On arrive à un pareil bon marché par suite de la rapidité de la fabrication, et cependant cette montre d'un sou passe entre les mains de vingt ouvriers. La montre de luxe à cinquante centimes, avec un mouvement et des aiguilles qui marchent, à laquelle est adapté un anneau et une chaîne, exige le concours de trente-deux ouvriers.
La ferblanterie pour enfants est une spécialité, et beaucoup de personnes ignorent que les vieilles boîtes à sardines et de conserves, recueillies dans les ordures, sont employées par des industriels pour la fabrication de tous les petits objets métalliques vendus, cinq, dix et quinze centimes. Il y a trois ou quatre fabricants de cette ferblanterie. Ils occupent plus de trois cents ouvriers et ouvrières et font chaque année de beaux bénéfices.
Comme cette industrie exige un capital très restreint, quelques ouvriers travaillent pour leur compte.
Avec quelques outils et des rognures de fer-blanc, un ouvrier intelligent peut produire... des balances qu'il vendra vingt-cinq centimes à la douzaine, des sifflets à dix centimes la douzaine, et encore des petites trompettes, des plats, des boîtes au lait, des cafetières... S'il est habile, il confectionnera à lui seul la boîte de ménage - boîte en carton dont le couvercle est remplacé par un morceau de verre. Au fond de la boîte, on étend de la ouate pour garnir. C'est-à-dire pour qu'il y ait moins d'objets à mettre. On place alors différents ustensiles de table, en fer blanc... et tout cela pour soixante ou soixante-dix centimes la douzaine.
Depuis quelques années, les jouets en caoutchouc ont pris une grande extension . Par suite des perfectionnements apportés dans la fabrication, on est arrivé à faire en caoutchouc toutes sortes d'objets : bonshommes, animaux... et à les offrir à un prix relativement bon marché. Les bébés et les ballons en caoutchouc ont toujours le plus de vogue. C'est par cent mille douzaines qu'il s'en débite tous les ans.
Les jouets mécaniques ont fait beaucoup de progrès . Autrefois, une petite voiture roulant sur le parquet, le cheval, le chien, la souris trottinant sur la table au moyen d'un mouvement d'horlogerie coûtaient fort cher. Aujourd'hui, on est arrivé à fabriquer les mêmes jouets à des prix abordables. Ce qui coûtait, il y a une dizaine d'années, douze et quinze francs, revient actuellement à cinq ou six francs.
Des jouets à la fois intéressants et instructifs sont ceux qui représentent quelques unes des nombreuses productions de l'électricité . On est arrivé à faire de petits appareils aussi simples que coquets, fonctionnant parfaitement. Sans parler de la machine électrique, nous citerons la galvanoplastie, procédé qui permet aux enfants de mouler des médailles en plomb et en étain au moyen de l'électricité. Il y a également des moteurs, des chemins de fer, de petites bobines Rhum-korft, etc... Le seul inconvénient de ces jouets, c'est que leur prix un peu élevé ne permet pas de les mettre entre les mains de tous les enfants.
Paul Baret