DANS les années cinquante, la ville de Cologne, mieux connue dans le monde pour son eau odorante, s'est faite complice d'une intéressante production d'autos en miniature, connues sous la marque Prämeta. De parfaits petits automates à découvrir ou redécouvrir.Si la vie des quelques rares modèles Prämeta est courte, elle n'en est pas moins empreinte de curiosité et de fascination. Il a été, en effet, produit en tout et pour tout seulement 5 modèles différents entre 1948 et 1958, mais, il est vrai avec de nombreuses variantes. L'atelier de mécanique de précision à qui revient la paternité de ces 5 modèles portait le nom de Kölner Automodellen Werk Prämeta (Fabrique d'autos miniature Prämeta de Cologne). Il était situé depuis 1925 à Hohenberg, proche banlieue de Cologne, en Allemagne. Quant au nom Prämeta, il est issu de la contraction de "PRÄzision" et "METAll" ou "METAllisch".La fonte qui servait à l'élaboration de la carrosserie et des pièces mécaniques était faite d'un amalgame de très haut niveau de robustesse. En dehors de la visserie et des ressorts, aucune pièce de fer ou de tôle ne rentrait dans la composition des automobiles Prämeta.Le premier modèle de la série fut une Volkswagen typique des années 47-48, avec sa vitre arrière ovale en 2 éléments. Contrairement aux autres modèles de la marque, cette VW n'est pas une réussite esthétique, ce qui, probablement, limita sa diffusion et qui fait qu'aujourd'hui, elle est devenue un modèle très rare. Réalisé dans le style razor edge, ce jouet ressemble à une ébauche de bois chère aux maquettistes. De plus, à l'inverse des quatre autres modèles de la marque, la VW ne possède aucun mécanisme ni référence sous le châssis. Seule particularité permettant de l'attribuer à la famille Prämeta, le projecteur avant tournant en même temps que les roues.En 1949, après cette VW, Prämeta sort sous la référence 0364, la Buick 405. Cette fois, ça y est. La société de Cologne a atteint, avec l'automobile américaine, la qualité qui va la caractériser: fidélité de la reproduction et complexité dans le mécanisme. Certains n'ont pas hésité à parler, à son sujet, de véritable "automate de l'automobile"!La série qui suivra et qui comportera la Mercedes Benz 300 (année de sortie 1953), la Jaguar XK 120 (1954) et l'Opel Kapitän 555 (1955) présente des caractéristiques communes avec la Buick: unique projecteur sous le parechocs avant servant à la direction manuelle; parallèlement, apparition en saillie sous les ailes avant de feux directionnels mécaniques, d'un feu de recul servant à positionner les vitesses (de la première à la troisième, y compris le point mort et la marche arrière), d'une programmation d'évolutions diverses à commande sous le châssis. A partir de ces éléments communs, Prämeta créera des variantes dont toutes ne sont pas encore entièrement connues, mais dont quelques-unes suffisent à ajouter un intérêt supplémentaire pour les collectionneurs et à entretenir un mystère, voire une curiosité.UNE CLE EN FORME DE FIGURINELa clé est un objet merveilleux. Elle représente un personnage en uniforme tendant le bras droit, comme s'il réglait la circulation, tout en repliant le bras gauche sous sa hanche de façon à ce que sa position dessine la lettre P. P comme Prämeta, évidemment! Deux conditionnements différents étaient prévus comme boîte d'emballage pour ces petites autos. La plus ancienne est réellement très enfantine par la fraîcheur et la naïveté de son style. L'autre, plus récente, est aussi de présentation plus moderne, plus adolescente, disons "plus collectionneur de miniatures". A l'intérieur, on pouvait trouver un bon de garantie de petit format contenant deux feuillets traduits en 4 langues différentes et ficelé à une roue arrière de l'auto. Les deux pages de ce bon sont retenues entre elles par une épingle de cravate de la marque de l'auto reproduite, piquée à travers les petits feuillets. Il est intéressant de noter que Prämeta a logé le remontoir du mécanisme, tout comme les diverses commandes, sous le châssis de façon à ne pas nuire à l'esthétique de la carrosserie et à maintenir une fidélité évidente au modèle réel. La firme allemande a encore poussé le soucis du détail jusqu'à dissimuler les deux commandes de fonction derrière un projecteur avant et un feu de recul!Le mouvement de zig-zag ou de slalom provient tout simplement d'un pivot en "Y" couché horizontalement. La base de ce "Y" est liée à la direction et ses bras reçoivent tour à tour une poussée provoquée par un plot fixé au bord extrême de l'axe moteur. En tournant, le moteur envoie buter le plot tantôt sur l'une des branches du "Y" tantôt sur l'autre, provoquant le mouvement de zig-zag de sa base et de ce fait de la direction à laquelle elle est rattachée. Le comble, c'est que cette pièce n'est pas vissée. Elle est simplement posée sur un guide. Une commande permet d'embrayer ou de débrayer cette manoeuvre.Lorsque l'on soulève une Prämeta (la Jaguar XK 120, par exemple), on découvre près des roues avant, trois lettres apposées sous le plancher, A, B et C; voici l'explication de leur présence: si vous placez le programmateur d'évolution en face du A, l'auto sera en position "non automatique", donc en déplaçant le gros phare antibrouillard sous le parechocs avant, vous pourrez la diriger à la main vers la droite, la gauche ou tout droit. Le B correspond à la commande automatique "grand rayon", alors que le C offre un automatiqme "petit rayon".UN REALISME ETONNANT !Fidélité et réalisme, deux qualificatifs qui reviennent le plus souvent dans les conversations entre collectionneurs au sujet de la Prämeta. Fidélité notamment dans l'échelle de reproduction (environ 1/32e) puisque tous les modèles sont établis sur cette même échelle et dans les détails, d'une grande précision. Par exemple, l'écusson Jaguar ornant l'extrémité du capot de la XK 120 ou bien encore l'exactitude dans la typographie des lettres sur les enjoliveurs de roues de la Buick qui ne peuvent laisser insensibles les passionnés de modèles réduits. Il semblerait que seule la Mercedes eut à souffir de cette fidélité, l'étoile chère à la marque allemande et déposée sur le bouchon du radiateur se transformant, hélas trop souvent, en étoile... filante, tant sa fragilité était grande. Il faut dire que cette exception à la rigueur de la production vient de ce que cette étoile fut le seul accessoire fabriqué en matière plastique et qu'elle ne supportait pas bien longtemps les escapades de l'auto sous les meubles...La Buick, la Mercedes et la Jaguar portent sous le châssis le label "Made in Germany Brit. Zone", en d'autres termes, ces jouets furent produits dans la zone d'occupation contrôlée immédiatement à la fin de la Seconde Guerrre mondiale par les soldats britanniques. A partir de 1955, avec l'apparition de l'Opel, ce label sera remplacé par le "Made in Germany - Pat. Amtl. gesch.".Les pneumatiques, de consistance très dure, ont été réalisés parfois en blanc et parfois en noir mais toujors avec l'inscription Prämeta dans un cartouche et sur un seul flanc avec quelquefois les données des dimensions: 500 x 16.La Buick existe en deux versions: la type 1 porte ses références sur des plaques de police, à savoir le chiffre 405, ce qui correspond au type du constructeur américain. Quant à sa calandre "dents de requin", les barres verticales sont en relief, légèrement détourées mais sans espace creux entre elles. La type 2 porte, elle, le nombre 1950 sur la plaque d'immatriculation et les barres de calandre sont, ici, complètement ajourées. Ce modèle a été mis en oeuvre, en 1950, pour marquer le 25e anniversaire de l'atelier de précision de Cologne, comme sera spécialement fabriquée en 1955 une Mercedes 300 pour le 30e anniversaire de la production. Décidément, on aime fêter les anniversaires chez Prämeta et les marquer de "pierres blanches". Pierres blanches devenues aujourd'hui pierres précieuses, vu la rareté de certaines variantes et les cotes généralement atteintes par l'ensemble de cette production.Prämeta est une fabrication particulière et curieuse qui tournait résolument le dos aux modèles lithographiés. Ses voitures se rapprochaient des miniatures Schuco, elles aussi allemandes, par l'extrême complexité de leur mécanisme et des miniatures françaises Solido pour l'aspect flatteur du chrome déposé sur leurs carrosseries, avec toutefois une supériorité quant à la tenue dans le temps de la fonte utilisée pour la production germanique. Prämeta réalisa également des variantes de décoration où le chrome était réservé uniquement aux accessoires. Aux versions les plus courantes chromées, viennent se joindre donc des versions avec bas de caisse colorés en peinture métallisée et haut de cabine monochrome beige, ainsi que des versions colorées métallisées et laquées avec haut de caisse de même teinte.Dernières précisions techniques, la transmission se fait en toute logique, pour les modèles choisis (Buick, Mercedes, Jaguar et Opel) sur les roues arrières, reliées par un essieu rigide; par contre, l'essieu avant est suspendu sur son axe central, donnant un effet de réalisme particulièrement saisissant. Sinon le plus fragile, en tous cas ce qui semble bien être le plus délicat sur une petite Prämeta chromée, c'est la peinture vert alcool des vitres.Généralement, les collectionneurs considèrent les Prämeta aussi bien comme des jouets de collection de qualité pour initiés (pièce en fonte d'excellente robustesse, précision des détails, attrait des mécanismes, originalité de l'aspect chromé...) que des bibelots pour amateurs d'art pur. Ce n'est pas peu dire.Mick Duprat